lundi 16 septembre 2013

Réflexions sur la bise

J'ai un problème avec la coutume française de faire la bise aux filles au travail. C'est quelque chose qui m'a toujours agacé et mis dans l'embarras.

Ce qui me gêne n'est pas tant l'acte en soi, encore que poser ses lèvres sur certaines peaux ne m'attire pas forcément. Non, ce qui m'embête c'est que ce n'est absolument pas carré, pas égalitaire, pas systématique.

Je m'explique: déjà, à chaque fois qu'on salue une fille, il faut se poser la question de savoir si on doit ou non lui faire la bise. Et si on décide que oui, il faut déterminer combien de bises on fera (généralement entre 2 à 4).

Ensuite, là où ça se complique et où pour moi la gêne est grande, c'est que faire la bise induit une hiérarchie.

En effet, quand on entre dans le système de la bise, il y a les filles à qui on la fait, et celles à qui on ne la fait pas. Cela peut devenir compliqué lorsque les deux sont mélangées: il faut alors gérer l'exception.

Par exemple, si on arrive dans un groupe de filles où l'on fait la bise à une seule personne, cela sous-entend une familiarité avec la personne.

Les autres peuvent se dire "ils se connaissent, ils sont potes", alors que si ça se trouve, cette bise n'est que la simple continuation du fait qu'on a fait la bise une fois et qu'on continue mécaniquement (une reculade pourrait être mal prise).

Autre cas: si on arrive dans un groupe de filles où l'on fait la bise à une majorité et qu'il en reste une à qui l'on ne la fait pas, il risque d'y avoir un moment de gêne quand après avoir fait le tour des joues on devra lui tendre la main, ce qui revient quelque part à l'exclure.

Nouvelle figure problématique: on arrive dans un groupe de filles qu'on embrasse d'habitude mais où se sont greffées d'autres filles. Que doit-on faire avec elles? Les embrasser, créant un précédent? Ne pas les embrasser, créant une cassure?

A ce problème s'ajoute celui des biseurs fous, c'est-à-dire ces mecs un peu lourds qui frétillent à l'idée de faire la bise aux filles, qui n'ont aucune gêne et qui, lorsqu'on se retrouve à saluer un groupe de filles avec l'un d'eux, mettent par terre toutes les stratégies péniblement mises en place.

Bref, quand on a une tendance à la prise de tête comme moi, on peut très vite se trouver à calculer, à hiérarchiser, quasiment à tenir un fichier de bises ou à éviter les gens pour n'avoir pas à gérer cette situation.

Dans mon job actuel, mes collègues sont essentiellement féminines, ce qui multiplie les soucis de ce genre. D'autant qu'une des personnes avec qui je travaille m'a fait la bise dès le premier jour, alors que les deux autres non.

De plus mon unique collègue masculin embrassant tout le monde, je me sens en porte à faux et ne sais pas comment "gérer" mes deux autres collègues femme...

Je sais aussi que j'ai déjà froissé plusieurs personnes par cette incapacité à gérer. Une secrétaire m'a fait une fois la bise, et je lui ai serré la main la fois d'après, ce qui l'a très visiblement vexée. Du coup je me suis mis à l'éviter, d'autant qu'elle gravite avec une quantité d'autres filles, donc un fort potentiel de cas complexes à gérer...

Et je parle pas du cas du nouvel an, où les compteurs sont brutalement remis à zéro!

Pour toutes ces raisons, j'envie grandement les pays, entre autres les anglo-saxons, où les contacts de ce genre sont prohibés et où un "hi !" asexué est de rigueur.

A la limite, je peux même préférer les endroits où la bise est systématique (comme dans ma première boîte), et où donc l'on n'a pas à s'embêter avec toutes ces subtilités.

La prochaine fois que j'aurais envie de parler complexes, j'évoquerai le tutoiement, qui me pose le même genre de problème (!)

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