dimanche 24 avril 2011

Scènes de métro (7): Rencontres

Dans le métro, où l’on croise une quantité industrielle de gens qu’on ne revoit souvent jamais, il arrive parfois que l’on fasse des rencontres, que les gens s’abordent pour une raison x ou y.

Cela m’est arrivé quelques fois, et je vais citer ici quelques-unes de ces rencontres, sympathiques, insolites ou étranges. Singulièrement, elles tournaient toutes autour d’un livre ou un magazine.

1. J’étais en train de lire « Le fils du pauvre », une autobiographie de l’écrivain algérien d’expression française Mouloud Ferraoun, dont la carrière s’était tristement achevée sous les balles de l’OAS.

Absorbé, je n’ai pas vu un homme s’approcher de moi et m’interpeller en me disant « comment ça se fait que vous lisez Mouloud Ferraoun ? ». Interloqué, je levais les yeux et tombais sur un maghrébin d'une quarantaine d'années au visage sincèrement ravi.

Un peu désarçonné, je bredouillais en guise de réponse quelques mots sur mon intérêt pour l’Algérie. Il commença alors à me dire « vous savez, c’est un grand, un très grand » avec passion.

Ma correspondance arrivant, j’ai hélas dû le laisser partir sans avoir pu continuer une conversation qui s'annonçait prometteuse. En nous séparant, il m’a chaleureusement dit au revoir avec un sourire triomphant qui faisait plaisir à voir.

2. Un autre matin, j’étais tranquillement en train de lire un livre présentant la Roumanie d’aujourd’hui quand un monsieur de la cinquantaine s’est adressé à moi.

Il s'est présenté comme un professeur qui allait faire sa prochaine rentrée en Roumanie, et ne connaissant pas ce pays et voyant ce que je lisais, il m'a bombardé de questions sur le sujet.

Je me suis fait un plaisir de lui transmettre tout ce que j’en savais (j'étais un peu envieux) puis nous nous sommes quittés.

3. Plus désagréable fut la rencontre suivante. Je lisais le Lonely Planet sur Israël et la Palestine quand un quadragénaire noir (je devinais rapidement qu’il était africain) engagea la conversation avec moi à ce sujet, conversation qui allait bien vite tourner au monologue.

Se présentant comme musulman, il me demanda pourquoi je lisais, puis sans me laisser répondre (heureusement, car j’étais bien embêté !) il commença à soliloquer sur la malédiction lancée par Allah sur les arabes de la région, justifiant presque les actes des israéliens (j’avais déjà entendu cette étrange histoire de malédiction dans la bouche d’un marocain).

Je ne savais pas trop quoi répondre pour m’en sortir, et fus fort heureusement sauvé par le gong quand arriva ma station.

4. La rencontre suivante fut de mon fait. J’étais en train de lire l’émouvant livre « Mon bel oranger » quand je m’aperçus qu’une femme cherchait sans discrétion à voir mon livre par dessus mon épaule.

Je me tournai alors vers elle et le lui montrai franchement, lui demandant cordialement si cela l’intéressait.

Très gênée, elle me dit rapidement qu’elle avait lu ce livre il y avait longtemps et qu’il l’avait elle aussi beaucoup touchée.

Toutefois, elle rentra bien vite dans sa coquille et la conversation tourna court.

5. La rencontre suivante fut provoquée par ma curiosité.

J’étais debout dans l’allée quand mon regard tomba sur un article qui avait l’air passionnant. Malgré tous mes efforts, je n’arrivai pas à déterminer quel était le magazine dans lequel il était écrit.

A la fin, je pris mon courage à deux mains et le demandais à la lectrice, une jeune maghrébine. Visiblement très surprise de ma requête elle me dit qu’il s’agissait de Tel Quel. Tout aussi gênée qu’elle, je la remerciais et nous en restâmes là.

6. La dernière rencontre n’est par contre liée à aucun livre.

Je me trouvais avec ma famille dans un RER quand j’avisais un homme au visage un peu triste qui me regardait. J’essayais de ne pas en faire de cas, mais je m’aperçus qu’il insistait vraiment. Embêté, je pris le parti de l’ignorer tout en le surveillant du coin de l’œil.

Au bout de quelques stations, il se leva pour descendre, mais avant s’approcha de moi. Je me demandais ce qu’il voulait quand il me dit qu’il avait rarement vu un fils ressembler autant à son père que le mien (!). Je m’attendais à tout sauf à ça…

Ces quelques exemples personnels illustrent le fait qu'il est finalement assez facile d'entrer en conversation, vu le panel de possibilités qu'offre la RATP.

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