vendredi 24 juin 2016

L'avant-gardisme des rallyes de la noblesse

Il y a peu je suis tombé sur une affiche pour le site de rencontres Blacklub, "Numéro 1 de la rencontre afro et métisse".

Il s'agissait d'un de ces sites de rencontres spécialisés comme il y en a tant.

Le premier que j'ai vu de ce genre devait être juif, mais depuis ce moment-là la segmentation s'est élargie, touchant d'autres religions ou nationalités, pour en arriver donc à cette histoire de couleur.

Cette floraison et mes souvenirs m'ont inspiré les quelques réflexions suivantes.

Lorsque j'étais enfant on parlait parfois des fameux rallyes qu'organisaient -et organisent encore- la haute bourgeoisie et les restes de notre noblesse.

Il s'agit de réunions privées où les enfants issus de ces milieux se retrouvent pour se distraire, danser, sociabiliser, l'idée étant qu'à terme ils puissent y rencontrer leurs conjoints.

Souvent regroupés par confession (protestante, juive mais surtout catholique), ces sauteries ont pour but de cultiver l'entre-soi, d'éviter les mésalliances et de perpétuer un statut, une position sociale, une image.

L'évocation de ces rallyes suscitait et suscite systématiquement un mélange de raillerie et de colère. Fermeture d'esprit, racisme, mépris social, aucun mot n'était assez dur pour critiquer leurs adeptes, que l'on soit de droite ou de gauche.

Maintenant, si l'on réfléchit bien, ces rallyes ne sont pas très différents de ces rencontres communautaires en ligne. Le but recherché est le même: ne pas sortir du groupe de référence.

Pourtant, je n'ai jamais entendu de condamnation équivalente.

Tout se passe comme si le mot magique de "tradition" valait absolution, pourvu que cette tradition soit exogène.

Rallye et sites communautaires sont pourtant exactement la même chose, et condamner l'un et pas l'autre est illogique: si l'on est contre l'idée d'entre soi, on doit être contre tous les entre sois.

C'est la même chose pour l'antisémitisme, le racisme ou l'homophobie: ils sont tout aussi condamnables quand leurs adeptes s'appellent Mohamed Merah ou Lefa que quand ils s'appellent Jean-Marie Le Pen.

Ce point-là ne semble hélas pas évident pour tout le monde (ICI une tribune intéressante sur le sujet).

En tout cas, force est de constater que les rallyes de ces braves bourgeois et nobles tant décriés n'étaient finalement pas un archaïsme issu d'un autre temps, mais au contraire une avant-garde de la société d'aujourd'hui.

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