jeudi 26 septembre 2013

France-Algérie, une longue histoire (3): L'Algérie avant la France

Le territoire algérien est peuplé depuis longtemps, ainsi que l'attestent de nombreux vestiges, comme ces célèbres fresques découvertes dans des grottes en plein désert et qui décrivent une faune et une flore luxuriantes disparues depuis.

1. Berbères, Phéniciens et Romains

Les premiers occupants de l'Algérie sont les Berbères. Ces peuples occupaient l'ensemble de l'Afrique du nord et parlaient des langues issues d'une même famille. Au mot "berbère", parfois vu comme péjoratif puisqu'il a la même racine que le mot barbare, eux-mêmes préfèrent celui d'amazigh.

Les Berbères étaient divisés en plusieurs groupes, plus ou moins organisés et puissants. Les noms de certains d'entre eux sont parvenus jusqu'à nous: Numides, Gétules, Maures...

Dans toute l'Afrique, ils furent bientôt en butte à la colonisation de peuples venus du nord et de l'est, surtout sur le littoral, le Sahara constituant une frontière sud quasiment inviolable.

Parmi les conquérants les plus célèbres il y eut les Phéniciens, qui fondèrent la civilisation  carthaginoise autour de la cité éponyme située en Tunisie et entretinrent des liens avec les populations locales pendant plusieurs siècles.

Ensuite il y eut les Romains qui, une fois qu'ils eurent remporté les guerres puniques et détruit leur rivale, intégrèrent le territoire algérien à l'empire.

A partir de -25 av. J-C et pour de longs siècles, la Pax Romana régna en Algérie, où selon le modèle appliqué partout où Rome domina, des colons s'installèrent, l'aristocratie locale fut intégrée aux notables de l'empire, et des villes furent fondées, dont les traces sont encore visibles aujourd'hui (Camus a parlé de Tipaza dans un de ses livres). 

Parfaitement intégrée à l'empire, dont elle constituait l'un des greniers, l'Afrique du nord donna de grands hommes à Rome, tels Saint Augustin, l'un des plus grands penseurs chrétiens, reconnu par l'ensemble des confessions modernes, ou l'éphémère empereur Macrin.

Le passage au christianisme se fit également sur la rive sud de la Méditerranée. Toutefois, une des singularités de l'Afrique du nord fut sa perméabilité à de nombreuses doctrines considérées comme hérétiques, notamment le donatisme.

De nombreux juifs apportèrent également leur religion dans toute la province, où ils resteront présents jusqu'à leur exode à la fin de l'ère moderne.

2. Invasions barbares, Byzance et conquête arabe

Lorsque les invasions barbares eurent raison de la partie ouest de l'empire romain, plusieurs peuples débarquèrent en Afrique du Nord.

Le cas le plus célèbre fut celui des Vandales, groupe de tribus scandinaves qui connut un long périple, chassée de territoire en territoire dans toute l'Europe avant d'échouer en Algérie. Ils domineront la province pendant presque un siècle, emmenant avec eux le christianisme arien.

La période vandale, si elle a laissé peu de traces culturelles ou ethniques en Algérie, a constitué une longue rupture entre la région et un monde romain dans lequel elle était parfaitement intégrée, et par conséquence une montée des pouvoirs locaux.

La reconquête par les troupes byzantines commença vers 530, mais leur domination resta fragile et se heurta à de nombreuses résistances de la part de chefs berbères.

Cette parenthèse byzantine prit fin lorsque commença l'invasion qui allait être la plus marquante pour l'identité du Maghreb: sa conquête par les armées arabes musulmanes, à partir des années 640. 

Elle fut longue et difficile, dura presque un siècle et fut ponctuée par de nombreux affrontements entre les nouveaux arrivants et des pouvoirs berbères bien résolus à résister. On se souvient de la célèbre reine la Kahina.

Si l'islam fut assez rapidement adopté par les berbères, la langue résista plus longtemps.

Un vrai basculement dans la population commença à l'installation des Beni Hillal, tribus venues d'Arabie qui essaimèrent dans tout le Maghreb, assimilant la majeure partie des habitants en leur apportant leur langue et leurs noms en même temps que leur religion.

A partir de ce moment, et pour de longues années, l'histoire de l'Algérie va alors se confondre avec celle des entités héritières des conquêtes arabes, dépendant alternativement de Damas, du Maroc, de l'Andalousie.


L'Algérie accueillera aussi les réfugiés morisques et marranes lorsque la Reconquista espagnole les chassa d'Espagne, et également des branches minoritaires de l'islam comme le kharidjisme.

3. L'époque ottomane

Commença ensuite la longue période ottomane. Initiée par les frères Barberousse, pirates ayant conquis Alger avant de la donner en allégeance à la Sublime Porte, la domination turque dura de 1515 à 1830, date d'arrivée des Français.

Cette période structurera le pays pour la première fois, avec une façade maritime contrôlée par un régent dépendant de manière plus ou moins lâche du sultan et un arrière-pays mal tenu, aux mains de pouvoirs locaux à la vassalité incertaine.

Peu de gens s'installèrent en Algérie turque, mais suffisamment toutefois pour que naisse un peuple métis, les kouloughlis, produit d'unions entre janissaires ottomans et indigènes d'Algérie, qui tenteront à plusieurs reprises de jouer un rôle politique.

La Régence était connue et crainte de toute l'Europe pour ses actions de piraterie et la réduction en esclavage des chrétiens qu'ils capturaient.

En conséquence l'hostilité était de règle avec les pays du nord, déjà présente à cause de la rivalité religieuse. Plusieurs guerres ou expéditions contre la régence d'Alger furent ainsi tentées par les puissances européennes. Charles Quint notamment organisa un débarquement en 1541, qui échoua.

Par ailleurs, durant toute la période ottomane ont existé en Algérie des enclaves européennes, essentiellement espagnoles comme Oran, qui avaient été conquises ou négociées par les puissances.

Enfin, dans la Régence, les Juifs étaient nombreux et constituaient une minorité protégée et strictement soumise au statut de la dhimma.
 
Si l'on résume ce très court panorama, lorsqu'en 1830 la France débarqua sur le sol algérien, elle s'attaqua à une colonie turque, où les Ottomans dominaient depuis trois siècles des peuples aux identités fortes mais qui n'avaient jamais connu d'entité étatique indépendante les réunissant.

Ce point est important pour comprendre l'argumentaire qui fut développé lors de la colonisation française.

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